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ressorts actionLa table des ressorts de l'action

Jeremy Bentham

Traduction, notes et introduction Jean-Pierre Cléro

l'unebévue éditeur, ISBN : 2-914596-22-7, ISSN : 1284-8166, 224 p. 28€

La Table des ressorts de l'action (1815-1817) est, sans doute, l'un des livres les plus controversés de la philosophie anglaise du XIXe siècle ; même chez les utilitaristes. Bentham le considérait probablement comme le socle de l'équivalent de ce qu'on appelle aujourd'hui sciences humaines, lesquelles se mettent en place depuis l'âge classique en Angleterre. La question est de savoir comment agissent les forces qui influencent la volonté.

Stuart Mill juge sévèrement le livre et la Déontologie, à laquelle il se rattache, désastreuse et indigne d'une publication en ce que l'ouvrage fait apparaître les représentations comme les jouets idéologiques d'une dynamique psychique ou pathologique censée en donner les véritables clés. Or, à ses yeux, les représentations doivent se trouver au centre de la vie politique. Agir humainement implique qu'on intervienne sur elles et par leur moyen ; mais non pas directement sur la volonté.

Accusé de toutes les ambiguïtés, le livre est, de fait, difficile à identifier. Ce n'est pas un livre de psychologie, car il ne préjuge pas des limites du psychisme individuel. Ce n'est pas un livre d'histoire ou de sociologie. Ce n'est pas non plus un livre de linguistique quoiqu'on y trouve une somptueuse table du vocabulaire affectif de la langue anglaise, préparatif stratégique de la « guerre des mots ». Il n'est même pas directement question, dans ses pages, de politique ; et pourtant Stuart Mill ne s'y est pas trompé : elles nous situent au cœur d'un problème politique majeur. Faut-il agir sur les opinions des gens ou est-ce sur les désirs, les intérêts qui motivent les actions, qu'il faut intervenir ? Rude question que soulèvera encore, quarante ans après la publication de La Table des ressorts de l'action, l'auteur des Considérations sur le gouverne-ment représentatif. Le problème n'a pas seulement une résonance politique ; il pose généralement la question du mode et des lieux d'intervention lorsqu'il s'agit du psychisme. Quel est le réel sur lequel on a prise dès lors que l'on envisage de mobiliser les psychismes ?

Jean-Pierre Cléro

Spécialiste de philosophie anglaise, le traducteur, agrégé et docteur de philosophie, est professeur des universités à Rouen (où il est membre du CERCLA) et à Paris X - Nanterre (où il dirige le Centre Bentham). Il s'intéresse depuis longtemps à l'utilitarisme classique, moderne et contemporain. Déjà, en 2004, il a donné une version pour L'Unebévue de Chrestomathia. Toutefois, l'utilitarisme n'est retenu, par l'auteur de ces traductions, comme doctrine politique que pour autant qu'il détient et inspire une théorie des fictions. Il a fait paraître, dans ce registre, outre une Théorie de la perception (2000), La raison de la fiction. Les philosophes et les mathématiques (2004) et, plus récemment, en 2008, un livre sur L'autorité, un autre sur Les dis-cours de la sympathie et le tout dernier sur Pascal.