560150bw.png

PLACE PUBLIQUE 2025

 

La question de la sensation dans l'exercice de la psychanalyse

La question de la sensation dans l'exercice de la psychanalyse (2)

Lacan et la sensation à travers Schreber

par Marcelo REAL

samedi 4 octobre de 9h à 16H30

à L'Agora 64, rue du Père Corentin  Paris 75014
Métro ligne 4 Porte d'Orléans, Bus 38 & 92, Tram T3a
 

  Argument


Les perversions débouchent régulièrement sur la zoophilie et elles ont un caractère d’animalité. Elles ne s’expliquent pas par le fonctionnement de zones érogènes abandonnées plus tard, mais plutôt par l’action de sensations érogènes qui perdent plus tard cette puissance. On se rappellera ici que chez l’animal le sens directeur (pour la sexualité aussi) est l’odorat qui, chez l’être humain est atténué. Tant que l’odorat (− le goût) est dominant, l’urine, l’excrément et toute la surface du corps, le sang aussi, ont une action sexuellement excitante. L’intensification de l’odorat dans l’hystérie a sans doute à voir avec cela. Les groupes de sensations ont beaucoup à voir avec la stratification psychologique, c’est ce que montre sans doute la façon dont les choses se répartissent dans le rêve et cela est sans doute en rapport direct avec le mécanisme des anesthésies hystériques.
Freud, Lettre du 11 janvier 1897 au Dr. Wilhelm Fliess

Les affects et les sentiments correspondent à des processus d’évacuation dont les expressions ultimes sont perçues comme des sensations.
Freud, L’inconscient, 1915

L'angoisse c'est la sensation du désir de l'Autre. Si je ne me sais plus objet éventuel de ce désir de l'Autre, cet Autre qui est en face de moi, sa figure m'est entièrement mystérieuse, dans la mesure surtout où cette forme comme telle que j'ai devant moi ne peut en effet non plus être constituée pour moi en objet, mais où tout de même je peux sentir un mode de sensations qui font toute la substance de ce qu'on appelle « l’angoisse », de cette oppression indicible par où nous arrivons à la dimension même du lieu de l'Autre en tant qu'y peut apparaître le désir.
Lacan, L’identification, 4 avril 1962.

L’objet a dans le champ visuel, ressortit… au regard de la structure objective… à la fonc- tion de ce tiers terme dont il est frappant que littéralement les Anciens ne sachent pas qu’en faire, le ratent alors que c’est quand même la chose la plus grosse qui soit. Eux aussi se trouvent entre deux : la sensation, c’est-à-dire le sujet, et puis le monde qui est senti.
Lacan, D’un Autre à l’autre, 30 avril 1969

Si élaboré qu’on le fasse – c’est à quoi l’analyse vous ramène – si élaboré qu’on le fasse, dans l’Imaginaire on y est. Il y a pas moyen de le réduire dans son imaginarité. C’est en ça que la topologie fait un pas. Elle vous permet de penser – mais c’est une pensée d’après-coup – que l’esthétique […] que ce que vous sentez, autrement dit – n’est pas en soi, comme on dit, transcendantale : que c’est lié à ce que nous pou- vons très bien concevoir comme contingence, à savoir que c’est cette topologie-là qui vaut pour un corps. Encore n’est-ce pas un corps tout seul ! S’il n’y avait pas de Symbolique et d’ex-sistence du Réel, ce corps n’aurait simplement pas d’esthétique du tout, parce qu’il n’aurait pas de tore-boyau.
Lacan, R.S.I., 18 mars 1975.

L’angoisse c’est ça, c’est ce qui est évident, c’est ce qui de l’intérieur du corps exsiste, ex-siste quand il y a quelque chose qui l’éveille, qui le tourmente.
Lacan, R.S.I., 17 décembre 1974.

Enfin Guattari est sagace à poser la question d’où l’effet du langage s’impose au corps, par ce qui en revient à l’idéal d’une part, de l’objet a de l’autre. C’est un pathos pour l’idéal, mais aussi une corps(e)ification. C’est dans l’objet a que la jouissance y fait retour, mais à ce que ruine de l’âme ne s’y consomme que d’un incorporel.
Lacan, 19 avril 1970

...mon Schreber (et même ici biprésident, aigle à deux têtes).
Lacan. L’étourdit.

Le moi, qui est perçu comme une prétendue unité à l’intérieur du champ de la conscience , est également en réalité un objet, quelque chose à l’égard duquel
« l’immédiat de la sensation » est mis dans une certaine relation de tension.
Lacan, 8 décembre 1954.

C’est dans cette tension que se produiront des expériences sensibles que le moi vivra comme propres – alors qu’elles se produisent dans un autre corps – ou étrangères – alors qu’il les expérimente ou les sent dans son propre corps – d’où le fait que le moi ne concorde pas toujours avec le senti dans la propre chair. Les Voix des oiseaux parleurs sont des Voix qui s’introduisent dans sa tête, à la façon de longs fils et qui, par le biais du « poison de cadavre », lui produisent une sensation douloureuse de tension (schmerzhafte spannende Empfindung). Ces virus de cadavres sont des énoncés parasites qui le corrompent et le blessent à tel point qu’il en arrive à sentir une odeur de pourriture sortir de sa bouche en raison de la pourriture de son abdomen.
Marcelo Real, Micropolitiques de la sensation. à paraître.

Chaque fois que les oiseaux sont vidés du poison de cadavre dont on les a chargés, c’est-à-dire chaque fois qu’ils ont débité les phrases galvaudées qu’on leur a inculquées, ces oiseaux miraculeux expriment, tous sans exception, le sentiment authentique de plaisir qu’ils éprouvent au contact de la volupté d’âme rencontrée dans mon corps, volupté à laquelle ils prennent leur part, par ces mots : « Sacré lascar ! », ou encore : « Ah ! par exemple, fichtre », poussant par conséquent des exclamations humaines avec les seuls mots qui restent encore à leur disposition pour traduire un sentiment authentique [ächten Empfindung].
Schreber, 1975 [1893]

On tenta donc de me pomper la moelle épinière, ce qui eut lieu par l’intermédiaire des dits “petits hommes”, que l’on me mettait dans les pieds. […] en règle générale, il y en avait toujours deux, un “petit Flechsig” et un “petit v.W.”, dont je percevais également les voix dans mes pieds.
Schreber. Cité par Freud dans Remarques psychanalytiques sur un cas de paranoïa (dementia paranoïdes) décrit sous forme autobiographique [1910].

Nous sommes accoutumés à penser que toutes les impressions que nous recevons du monde extérieur se forment par le truchement des cinq sens comme on les appelle, et qu’en particulier toutes les impressions lumineuses et sonores sont médiatisées par l’œil et l’oreille. Cela peut d’ailleurs demeurer juste dans les circons- tances ordinaires. En revanche, chez un être humain entré comme je le suis en com- munication avec les rayons, et dont, de ce fait, la tête est en quelque sorte illuminée de ces rayons, cette idée habituelle est insuffisante. Je reçois quant à moi des impressions lumineuses et sonores qui sont projetées directement sur mon système nerveux interne, et pour l’appréhension desquelles les organes externes de la vue et de l’ouïe ne sont point nécessaires. Je peux voir les choses dont il s’agit même avec les yeux fermés, et en ce qui concerne, comme c’est le cas pour les « voix », les pro- cessus apparentés à l’audition, je pourrais entendre alors même qu’il serait possible de boucher hermétiquement mes oreilles à tout stimulus sonore.
Schreber, 1975 [1893]

♦ ♦ ♦ ♦ ♦

Le matin

Un film. Il nous emmènera vers des mutations dans la sensibilité quand des corps s’attirent.

L’après-midi,

Marcelo Real va continuer de nous présenter une partie de ses travaux sur “les micropolitiques de la sensation, analyse de l’inconscient et psychédélie”, sous le titre, pour aujourd’hui, de “Lacan et la sensation à travers Schreber”. Il sera donc question d’une économie des signes sensibles et de l’esthétique non kantienne des sens sans organes.

♦ ♦ ♦ ♦ ♦

 

Des articles et des livres :

D. P. Schreber, Mémoires d’un névropathe, 1893. Éditions du Seuil, 1975.
S. Freud :

  • Projet d’une psychologie, 1895.
  • L’inconscient, 1915
  • L’inquiétante étrangeté, 1919.

J. Lacan :

  • L’identification (4 avril 1962).
  • D’un Autre à l’autre (30 avril 1969).
  • Allocution prononcée pour la clôture du Congrès de l’École freudienne de Paris (19 avril 1970)
  • R.S.I. (10 et 17 décembre 1974, 18 mars 1975).

E. Kant :

  • Rêves d’un visionnaire, 1766.
  • Critique de la raison pure (I, 1e partie : « Esthétique transcendantale »),1781.

A. G. Baumgarten, Esthétique, 1735-1758.
G. Deleuze, Francis Bacon, Logique de la sensation, Éditions du Seuil, 1981.
G. Deleuze et F. Guattari, Qu’est-ce que la philosophie ? Les Éditions de Minuit, 1991.
F. Guattari et S. Rolnik, Micropolitiques, Empêcheurs, 1986.
M. Real. “Le plan guattarien de composition de sensations”, Revue Chimères. Guattari +30
. N° 101, 2022, pp. 167-178.

Vous trouverez les annonces et certains textes sur le site de L’unebévue à www.unebevue.org.

♦ ♦ ♦ ♦ ♦

Inscription sur place à 9h.

Participation aux frais pour la journée : 30 euros - tarif réduit possible.

adresse mail  : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

L’unebévue revue de psychanalyse

82 avenue de breteuil 75015 paris Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

www.unebevue.org