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Science des rêves et science des revues

Lydia Marinelli et les revues freudiennes

 

La monographie, premier point de contact entre le lecteur et l’écriture psychanalytique

 

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Jusqu'en mars 1909, la toute nouvelle Association psychanalytique de Vienne, issue de la Société psychologique du mercredi privilégie encore la forme de la monographie pour ses publications. Les textes d'un seul auteur constituent pratiquement l'unique point de contact entre les lecteurs et l'écriture psychanalytique. Le manuel freudien, sous la forme du livre, s'adresse à un public lointain et se voit donc condamné à rappeler sans cesse les prémisses théoriques pour tenter de le convaincre. Sur la place viennoise, Franz Deuticke est sans conteste l'éditeur le plus important pour la diffusion des œuvres de Freud. Dès 1891, celui-ci  lui a confié la publication de sa toute première monographie, À propos de la conception des aphasies [1] , puis Les études sur l’hystérie[2]en 1895. Il restera également le fidèle éditeur des huit éditions de laTraumdeutung [3].

En 1907, Freud élargit sa base éditoriale par l'introduction d'un nouveau support, celui de la collection périodique, d'une utilisation un peu plus souple.

 

 

 

03 schriftenLes Schriften zur angewandten Seelenkunde, Écrits de recherches appliquées à l'esprit, collection éditée brièvement par Hugo Heller puis Deuticke, paraîtra deux fois par an. Bien qu'elle maintienne le principe d'un auteur unique par volume, elle introduit cependant l'idée nouvelle de série et inscrit une rupture avec le modèle classique du manuel pour lequel « l'évènement » de l'édition originale continue d'occuper une fonction mythique. Ce premier périodique, dirigé uniquement par Freud, publie une série de seize monographies de psychanalyse appliquée entre 1907 et 1914, d'une très grande tenue et affiche clairement son objectif interdisciplinaire. On peut y lire des contributions variées de Max Graf, Jung, Abraham, Rank, entre autres, et découvrir l'unique monographie de cette collection écrite en 1913 par une femme, Hermine Von Hug-Hellmuth, Extraits de la vie psychique de l'enfant. Freud y fait paraître deux textes majeurs, Délire et rêves dans la Gradiva de Jensen en 1907, puis Un souvenir de Léonard de Vinci, trois ans plus tard. La publication de ces monographies est suspendue pendant la première guerre, puis elle s'essouffle, pour s'interrompre définitivement en 1925, après seulement quatre volumes édités entre 1919 et 1925. Malgré le succès indiscutable des premières années, la collection ne résistera pas à l'arrivée d'une autre machine éditoriale bien plus efficace : la revue psychanalytique, dont la forme est idéalement réactive, en tout cas plus appropriée à une jeune science orientée vers l'avenir.

 

38 Imago I 1912Avec Imago. Zeitschrift für die Anwendung der Psychoanalyse auf die Geisteswissenschaft, (maladroitement et constamment traduit par Revue de psychanalyse appliquée aux sciences de l'esprit), Freud impose, en 1912, sa troisième revue après le Jahrbuch (1909) et le Zentralblatt (1910) qui étaient orientés en priorité sur des applications et des développements cliniques. Lydia Marinelli ne manquera pas de rappeler que ce troisième périodique cherchait à exploiter un concept de revue résolument nouveau, assez proche d'un forum, lequel devait favoriser le dialogue de la psychanalyse avec les sciences voisines comme l'anthropologie, la philosophie, la littérature, les sciences de la religion et du langage.

Freud perçoit très rapidement que les manuels classiques et la série des Schriften sont incapables de rendre compte de la richesse des débats ou de traiter toutes les questions qui agitent les groupes de travail à Vienne, Berlin ou Zurich. La monographie scientifique, avec ses tirages en petit nombre et son lectorat spécialisé se plie mal aux conditions du marché commercial. Au fil des cycles rapides qui déterminent la durée de vie d'un livre, le risque financier est réel car chaque nouveau tirage s'accompagne de coûts exorbitants.

10 centralblatt medicischenPar ailleurs, il constate qu'une multitude de contributions analytiques est éparpillée dans des revues médicales (entre autres, la Psychiatrich- Neurologische Wochenschrift, Revue hebdomadaire de psychiatrie et de neurologie ou le Centralblatt für die medicinischen Wissenschaften, Bulletin central pour les sciences médicales), des revues d'anthropologie ou d'histoire des religions.

Un profil littéraire autonome et spécifique est donc devenu urgent pour que ces apports soient enfin accessibles et acquièrent davantage de visibilité. Bien plus tôt, plus de vingt avant qu'il n'ait l'idée de fonder sa première revue, Freud a déjà rencontré un immense scientifique à la tête d'un véritable empire éditorial, personnalité adulée autant que redoutée dans le cercle médical, Jean Martin Charcot. Lorsqu'il le rencontre à Paris en 1886, celui-ci, en effet, a déjà créé cinq périodiques. L'année suivante, en 1887, Charcot fonde la prestigieuse Revue de l'hypnotisme puis accède au comité de rédaction de quatre autres, étendant son influence par un contrôle inflexible sur les revues françaises de neurologie et de psychiatrie. À la fin du XIXe siècle, une centaine de revues scientifiques inonde le marché éditorial parisien.

Dans la mesure où la science se sert non seulement de la rhétorique du progrès mais se pose comme détentrice de l'idée même du progrès, l'actualité et la périodicité en deviennent les signes distinctifs et la revue l'instrument le plus approprié. Le risque, bien-sûr, réside dans la soumission, toujours possible, au diktat de l'actualisation constante qui peut conduire à l'épuisement d'une recherche avant même qu'elle ne porte ses fruits. La pratique de cet espace éditorial est un exercice particulièrement instable et contraignant sous peine de le transformer, a contrario, en sinistre chambre d'enregistrement d'un savoir déjà établi ou d'un nouveau dogme.

Le monde des revues que Freud érige entre 1909 et 1913 s’empare de façon particulière de la stylistique du fragmentaire et de la transversalité et permet, au-delà des efforts nécessaires de définition, toute une série de travaux qui parcourent les domaines les plus divers de la recherche.

Ainsi naquit, au milieu du nombre envahissant des périodiques neuropsychiatriques, en 1909, la première revue psychanalytique qui devait ouvertement rendre compte de la spécificité et de la spécialisation de la psychanalyse.

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[1]Sigmund Freud, Zur Auffassung der Aphasien (1891), Deuticke, Leipzig, Wien, Contribution à la conception des aphasies, Paris, P.U.F, 1993.

[2] Sigmund Freud, Joseph Breuer, Über den psychischen Mechanismus hysterischen Phänomenen (1895), GW, Bd.I, Études sur l'hystérie, Paris, P.U.F, 1956.

[3]Sigmund Freud, Die Traumdeutung (1899-1900), F. Deuticke, Leipzig, Wien, GW., II, III, L'interprétation des rêves, Paris, P.U.F, 1967.